Montpellier–Rennes, histoire d’un axe fort

Depuis plus de 20 ans, Rennes a toujours aimé recruter des anciens Montpellierains. Une tendance qui se poursuit malgré le changement de statut du club breton et qui est désormais aussi valable dans le sens inverse. Récit

En lisant la feuille de match située au dos de L’Écho de la Mosson, les fidèles de l’antre des Pailladins ne manqueront pas de reconnaître deux noms familiers : Jonas Martin et Gaëtan Laborde. Le premier vit sa troisième saison à Rennes depuis son transfert en provenance du Racing Club de Strasbourg durant l’été 2019, tandis que le second est arrivé directement de l’Hérault lors de l’ultime jour du dernier mercato estival en date, le 31 août dernier. Nul ne sait si Jonas et Gaëtan le savent, mais ils continuent de perpétrer un lien fort entre le club montpelliérain et son homologue breton.
L’origine de ce lien privilégié date peu ou prou de l’été 1998, date à laquelle le milliardaire François Pinault est devenu propriétaire du Stade Rennais. À l’époque, le club rouge et noir jouait au mieux le maintien en Ligue 1 et faisait même régulièrement l’ascenseur avec la Ligue 2.

S’il a formé de grands joueurs comme Sylvain Wiltotd ou Jocelyn Gourvennec (ce dernier a d’ailleurs joué quelques mois au MHSC entre août et décembre 1999 avant de retourner à Rennes), tous ces talents ne restaient pas forcément en Bretagne sur la durée. Mais le statut du Stade Rennais a changé après l’arrivée de son nouveau propriétaire. Dans la foulée de sa prise de fonction et après avoir lancé Paul Le Guen comme entraîneur principal, François Pinault fait venir des joueurs confirmés de Ligue 1 de l’époque parmi lesquels Cédric Bardon, Christophe Revault  Dominique Arribagé, ou Shabani Nonda. Peu à peu le club monte en gamme et, en plus de s’offrir quelques noms prestigieux comme le gardien Bernard Lama, il se spécialise dans le recrutement de joueurs à fort potentiel. S’il connaît d’abord quelques échecs en recrutant à l’étranger à l’image des Sud-américains Severino Lucas et Hector Turdo, le Stade Rennais se trompe rarement au moment d’acheter des joueurs français… et ce recrutement hexagonal a souvent un fort accent montpelliérain, ce qui constituait alors une nouveauté. En effet, mis à part Georges Calmette, Pierre Dell’Oste, Bernard Tichner ou bien encore Pascal Fugier, très peu de joueurs avaient porté le maillot des deux clubs jusqu’à la fin des années 1990.  C’est alors que le Stade Rennais s’est pris d’une affection folle pour la formation pailladine : Philippe Delaye a été le premier à rejoindre le club d’Ille-et-Vilaine durant l’été 2000, avec à la clé le co-record de la vente la plus chère de l’histoire de la Paillade.

Il fut suivi dans les 18 mois par Toifilou Maoulida et Olivier Sorlin arrivés tous deux en janvier 2002 à l’initiative de Christian Gourcuff, qui avait succédé à la Guen sur le banc, pour ce qui constituait alors son 1er passage à Rennes. Six mois plus tard, c’est cette fois László Bölöni qui recrutait un nouveau joueur du MHSC en la personne de Cédric Barbosa. À l’entame de l’exercice 2002- 2003, les Rouges et Noirs comptent dans leurs rangs 4 anciens Montpelliérains, au point que France Football avait concocté un article spécifique sur le sujet, intitulé : « Rennes le clan des Sudistes ».

Nouvel épisode de ce lien 8 ans plus tard lorsque le club breton, alors entraîné par Frédéric Antonetti, d’engager deux nouveaux anciens pensionnaires du MHSC : le gardien de but Johann Carrasso et l’attaquant Victor-Hugo Montaño. Si le premier ne jouera que très peu sous la tunique bretonne – où il était en concurrence avec Nicolas Douchez avant d’être prêté à l’AS Monaco puis de partir définitivement à Metz – le second a quant à lui emmené l’attaque bretonne pour laquelle il a inscrit 22 buts en 87 matchs toutes compétitions confondues avant de refaire le chemin inverse pour retrouver le Domaine de Grammont durant l’été 2013.

Le balai des anciens Montpelliérains rejoignant le Stade Rennais a repris en 2016, lorsque Ramy Bensebaini, qui avait découvert la Ligue 1 au MHSC lors de l’exercice 2015-2016 alors qu’il était prêté par le club algérien de l’AC Paradou, avait été acheté par le Stade Rennais à son club formateur.

Il fut rejoint un an plus tard par un autre ancien de la maison pailladine, en la personne de Mbaye Niang. Formé à Caen mais passé par Montpellier de janvier à juin 2014, l’ancien attaquant du Milan AC a inscrit 16 buts en 48 rencontres. Les 3 derniers exemples en date de joueurs étant passés du MHSC au Stade Rennais sont un peu différents. Le jeune attaquant formé à Montpellier Anthony Ribelin avait disputé 9 rencontres avec le MHSC lors de l’exercice 2015-2016, avant de signer son premier contrat professionnel au Stade Rennais. Il évolue aujourd’hui à Bourg-Péronnas. Membre de la prestigieuse génération 1990, vainqueur de la coupe Gambardella, Jonas Martin a disputé 115 matchs sous le maillot montpelliérain avant de partir au Betis Séville puis à Strasbourg. Ce n’est qu’après son départ du club alsacien durant l’été 2019, qu’il a rallié le club breton où il évolue toujours aujourd’hui. Il a ensuite été rejoint par Gaëtan Laborde le 31 août dernier après avoir débuté la saison à Montpellier. Il a déjà inscrit 8 buts en 20 matchs cette saison avec Rennes et sera un des atouts précieux de son nouveau club au coup d’envoi, tout comme Jonas qui a déjà pris part à 16 rencontres de championnat cette saison.

JEUNESSE CONTRE EXPÉRIENCE

Si, sur les 24 joueurs qui ont porté le maillot des deux clubs, la courbe est largement excédentaire en faveur des joueurs qui ont d’abord joué au MHSC avant de rejoindre le SRFC, il existe tout de même des cas inverses. Une tendance se dégage d’ailleurs : si Rennes est souvent venu chercher de la jeunesse à Montpellier, le club pailladin est souvent allé prendre de l’expérience au sein du club breton. Ce fut d’abord le cas avec Georges Calmette et Bernard Tishner dans les années 80, puis Pascal Fugier dans les années 90.

Ce fut aussi le cas durant l’été 2009 au moment de recruter Cyril Jeunechamp (passé par le club breton durant 5 saisons et qui était entre-temps parti à Nice) ou de John Utaka. Le buteur du match du titre à Auxerre en 2012, avait en effet brillé en Bretagne avant de rejoindre le club anglais de Portsmouth au sein duquel de MHSC l’avait recruté en janvier 2011. Même raison mais moins de réussite lors du mercato estival 2016 lors duquel Frédéric Hantz avait fait venir Yacouba Sylla, recruté par Rennes un an plus tôt après avoir porté le maillot d’Aston Villa.

Un an plus tard, au moment d’entamer son très beau cycle de quatre saisons à la tête du club montpelliérain, Michel Der Zakarian était lui aussi en quête de joueurs qui connaissait bien la Ligue 1 pour stabiliser son effectif qui sortait de plusieurs saisons traumatisantes. C’est dans cette optique qu’il avait recruté durant l’été 2017 Giovanni Sio (auteur de 10 buts cette saison-là) ainsi que Pedro Mendes qui est toujours au club aujourd’hui et qui a passé la barre des 100 matchs disputés sous le maillot orange et bleu.

Les deux hommes ont ensuite été rejoints durant l’été 2018 par Damien Le Tallec, formé à Rennes en tant qu’attaquant avant de partir à Dortmund, puis de s’épanouir à Montpellier au poste de milieu défensif. Damien Le Tallec fait partie des 3 joueurs formé à Rennes à avoir joué ensuite au MHSC, avec Jocelyn Gourvennec et Yassine Jebbour.
Pour toutes ces raisons, les liens entre Rennes et Montpellier ont toujours été très étroits. Même si le club breton a changé de statut ces dernières années, les deux formations ont pas mal de valeurs en commun, notamment celle de former des jeunes joueurs tout en les associant à des éléments plus expérimentés ou en devenir. Une philosophie qui leur réussit depuis de nombreuses années. ..