Des Montpelliérains à réaction au Stadium

Le 19 décembre 1998, le MHSC se déplace au Stadium pour le compte de la 20ème journée de L1. Après une défaite à domicile contre l'OM qui a fait sortir le président Louis Nicollin de ses gonds trois plus tôt, les Pailladins se déplacent chez la lanterne rouge toulousaine dans un contexte sulfureux et en quête de leur première victoire de la saison à l'extérieur.

« Il y a beaucoup de souvenirs autour de cette rencontre ... », lance tout d'abord Philippe Flucklinger. La voix de l'ancien gardien de but pailladin reste un moment en suspend et on comprend alors qu'on ne va pas être déçu du voyage dans le temps. Il faut dire que ce TFC-MHSC intervient seulement trois jours après  « Le » match : un certain MHSC-OM, 1000ème rencontre de l'histoire de La Paillade et une fête gâchée le soir des records (30 112 spectateurs à La Mosson). Les Pompons girls de l'avant-match ont fait place aux déclarations d'après-match d'un président Louis Nicollin visiblement fort mécontent de la défaite concédée à domicile face au voisin marseillais (0-1, but de Florian Maurice). Il faut dire, que le match aller entre les deux formations avait été celui du scénario le plus improbable de l'histoire du club, la fameuse défaite 5-4 alors que le MHSC menait 4-0 à la pause sur la pelouse du Vélodrome.

Quelques mois plus tard, Louis Nicollin attendait donc que son équipe prenne une revanche. Par dessus tout ! « Je me rappellerai toute ma vie la sortie du président après notre défaite lors de ce match retour», avoue l'ancien milieu de terrain Frédéric Garny. « Il nous avait massacrés », renchérie Nenad Dzodic, alors défenseur du MHSC. Il n'y avait pourtant pas de quoi rougir d'avoir perdu sur la plus courte des marges contre le grand Marseille de Rolland Courbis, une équipe de l'OM qui se disputera le titre de champion de France jusqu'à la fin de saison avec Bordeaux. Pourtant, une fois de plus quand on veut évoquer ce TFC-MHSC du 19 décembre 1998 avec un autre ancien, Philippe Delaye en l’occurrence, l'ex-milieu de terrain évoque lui aussi cette « remontée de bretelles de Louis Nicollin » avant tout autre chose pour finalement poursuivre : « Il voulait absolument qu'on gagne trois jours plus tard à Toulouse. » 11ème et bien calé au cœur du classement, le MHSC se déplace sans certitude au Stadium chez une équipe du TFC pourtant moribonde. Il faut dire que les joueurs de Jean-Louis Gasset sont toujours à la recherche de leur premier succès de la saison à l'extérieur et si les Pailladins enchantent La Mosson à coup de victoires et de buts à la pelle (2ème meilleure attaque du championnat mais pire défense), ils ont toutes les peines du monde à imposer leur jeu hors de leur bases. « C'était flagrant ce déséquilibre maison-extérieur, se souvient Nenad Dzodic. Il fallait trouver un équilibre chez nos adversaires car on était trop portés vers l'offensive en raison des joueurs de talent qu'on avait devant. » À Toulouse, il faut faire sans Xavier Gravelaine, le maître à jouer de cette belle bande de manieurs de ballon est suspendu comme face à Marseille. Par contre, Philippe Flucklinger est dans les cages alors qu'il s'est fait les croisés face aux Phocéens trois jours auparavant. « Je ne le savais pas encore et, en pleine période de tempête, Jean-Louis Gasset et Ghislain Printant avaient absolument voulu que je sois du voyage à Toulouse. » Le jeune Rudy Riou est sur le banc, au cas où. « Fluck », lui, ne le sais pas encore mais il va disputer le dernier match de sa carrière sous les couleurs du MHSC et même le dernier de sa carrière tout court ! Plein de souvenirs, avait annoncé celui qui est le dernier rempart ce soir-là d'une défense héraultaise trop perméable depuis le début de saison. Pas de quoi trembler quand même face à la lanterne rouge, Louis Nicollin a d'ailleurs annoncé la couleur : « Vous n'allez pas perdre chez ces.. ».. Oups on passe sous un tunnel, ça a coupé ! « Le TFC s'était un peu servi de ces déclarations pour se remonter le moral, estime aujourd'hui Philippe Delaye alors que Fred Garny évoque un avant-match qui les « avait un peu vexés. » Dans un sens comme dans l'autre.

C'était certainement l'effet recherché... et avec une tête de Franck Silvestre qui rase la cage dans les première minutes de jeu, les 10 000 spectateurs toulousains sont mis au parfum. Le MHSC n'est visiblement pas allé sur les bords de la Garonne pour faire du tourisme. Le TFC semble tout autant déterminé et la combativité toulousaine est récompensée dès la 10e minute de jeu. Vladimir Petrovic fonce balle au pied dans la moité de terrain pailladine et il est stoppé irrégulièrement par Michel Rodriguez. C'est donc un coup franc pour les Toulousains à près de 25 mètres. Après qu'un partenaire lui ait légèrement poussé le ballon, Antoine Préget exécute le coup-franc en l'enroulant avec suffisamment de puissance pour tromper un Philippe Flucklinger légèrement avancé. Le gardien, montpelliérain, à reculons, n'arrive pas à toucher le cuir qui file dans la lucarne (10ème, 1-0). « Je n'avais plus de genou, c'était compliqué... » Préget, lui, vient célébrer l'ouverture du score « en venant chambrer notre banc de touche », se rappelle Philippe Delaye. « Tout ce qu'il ne fallait pas faire », ajoute « Fluck ». L'ancien joueur nîmois prendra un carton jaune au passage, un avertissement qui aura toute son importance en fin de rencontre. Les joueurs du MHSC vont alors retourner une partie bien mal engagée, même si ce sont les hommes de Guy Lacombe qui sont à deux doigts de réussir le 2-0 à la 19e minute quand, sur un ballon amené par Petrovic puis Moreau, un tir de Jau rase les buts sans que Robert Malm ne puisse le reprendre. Dans un premier acte à 6 cartons jaunes et sur un terrain s'abimant au fil des minutes, le MHSC doit attendre l'approche du repos pour réagir au tableau d'affichage. Silvestre, d'un tacle glissé dans sa propre moitié de terrain, adresse une ouverture en profondeur pour Laurent Robert. Lancé comme un frelon depuis la ligne médiane, ce dernier touche le ballon en évitant le tacle du dernier défenseur toulousain, contourne un Teddy Richert sorti au devant de lui aux 30 mètres, puis Robert en profite pour se faire la valise. Le reste n'est qu'une formalité pour l'ailier gauche pailladin qui va pousser tranquillement le ballon au fond des filets (1-1, 40ème). Les courses des Héraultais donnent le tournis aux défenseurs du TFC et juste avant le repos, sur un corner renvoyé par les locaux et alors que tout le monde remonte, Delaye glisse le ballon côté droit vers Fugier. Lancé, « Fugigoal » déborde la défense toulousaine et centre sans contrôle pour Thimotée dans la surface de réparation. L'attaquant montpelliérain place une tête imparable (1-2, 45ème). 2-1 pour le MHSC et mi-temps.

Le navire toulousain tangue et le début de seconde période n'arrange rien pour les Violets avec Laurent Guyot qui fauche Robert. L'ailier gauche tire lui même le coup-franc et ajuste des 25 mètres le gardien du TFC d'une admirable frappe enroulée qui ne va pas sans rappeler celle de Préget lors du premier acte (1-3, 49ème). Alors au bord du naufrage, le TFC se voit proposé un remorquage sous la forme d'un penalty à la 55ème minute. Fabrice Jau est crocheté par Manuel Dos Santos dans la surface de réparation montpelliéraine et c'est Oceano qui transforme le penalty d'un plat du pied. Flucklinger était pourtant parti du bon côté (2-3, 55ème). Les Violets se remettent à y croire d'autant plus que 10 minutes plus tard, Jau a l'occasion d'égaliser mais il est repris in extremis par Dos Santos qui lui subtilise le ballon par derrière d'un tacle glissé aussi risqué que bien exécuté dans sa surface de réparation (64ème). C'est finalement le MHSC qui allume sa quatrième torpille à la 74ème. Delaye traverse tout le terrain avec le ballon pour centrer depuis le côté droit de la surface entre le gardien et le dernier défenseur toulousain. Laurent Robert, tout seul face au but vide n'a plus qu'à pousser le ballon au fond des filets pour un triplé retentissant (2-4, 74ème). « Laurent, c'était la force, la puissance, la vitesse et un joueur qui pensait but ! Il avait la rage de marquer », se rappelle un Frédéric Garny qui va lui aussi faire mouche. Après une longue course côté droit, il conclue d'un centre tir qui bat un Teddy Richert qui avait anticipé un centre plus en retrait (2-5, 81ème). « Une arnaque de but », rigole aujourd'hui Garny. Maoulida, entré en cours de jeu, a alors trois fois l'occasion de corser une addition déjà bien salée pour des Haut-garonnais qui jouent à 10 depuis l'expulsion de Préjet à 20 minutes du terme pour une charge à l'épaule sur Maoulida. Mais Richert évite une plus grande humiliation.

2-5 score final, le TFC est quand même bel et bien coulé. Avec 12 points et 2 victoires à la trêve, Guy Lacombe est limogé, remplacé par Alain Giresse, lui aussi limogé quelques semaines plus tôt par le PSG. Le MHSC, lui, tient enfin son premier succès de la saison à l'extérieur. « On avait super bien réagit après les déclaration du président », estime Frédéric Garny. « C'était pourtant un match à haute tension, juge Philippe Flucklinger. Comme le match de ce soir, avec la sortie de Loulou en moins ! » Après le coup de sifflet final à Toulouse ce 19 décembre 1998, Louis Nicollin était resté sur le banc de touche avec sa couverture. « Nous on est allé directement au vestiaire mais il nous a rejoint pour nous dire :« Alors vous ne venez même pas me voir ce soir après avoir gagné ? » » Après un joli cadeau de Noël sur le terrain pour notre président, et un autre collectif une fois dans l'intimité du vestaire pailladin, « Loulou s'est remis tout le monde dans la poche », avoue l'ancien gardien de but avant de rajouter : « Avant cela on avait réussi à se sublimer en étant très solidaires de Jean-Louis Gasset car il ne méritait pas selon nous toutes les critiques qu'avait subi l'équipe et les joueurs après Marseille. » Cette victoire à Toulouse ne sera pourtant pas le déclic tant attendu et le MHSC terminera malgré tout à une honorable 8ème place en fin de saison. « On avait un jeu porté sur l'offensive, on était très joueur, mais peut-être pas aussi rigoureux qu'on aurait dû l'être en ce qui concerne le repli défensif. Et on n'a jamais vraiment réussi à trouver l'équilibre attaque-défense et domicile-extérieur cette saison-là. On était dans le jeu complet et on se régalait vraiment », conclu Philippe Delaye.